Les 2,3, et 4 mai derniers je co-encadrais avec Lionel, Marie-Line et Eric le désormais classique stage Trad à Annot des clubs FSGT franciliens. Petit compte rendu du stage.

Lionel et Marie-Line m’avaient beaucoup parlé de ces clubs FSGT qui reviennent chaque année pour un stage trad (ou BigWall) et qu’ils affectionnent particulièrement, se montrant touchés par l’envie d’apprendre des stagiaires, ainsi que de leur capacité de « jouer le jeu », en affrontant les parties les plus agréables du sujet et celles un peu plus difficiles avec le même élan. J’ai donc approché ces trois jours d’enseignement avec à la fois l’enthousiasme d’un passionné, une peu d’attente vis-à-vis de nos élèves, mais aussi une certaine pression: je savais d’avance qu’avec eux il n’était pas question de s’épargner, de choisir des solutions de facilité maquillées en choix sécuritaire, ou de pas aller au cœur des sujets car trop compliqués.

Heureusement, le matin du premier jour nos stagiaires font en sorte de me laisser le temps d’un deuxième café, et pour faire redescendre toute pression résiduelle ils font même semblant (ou pas?) de se perdre sur le chemin! :p . Après ces petites péripéties on attaque avec un cours magistral sur les protections délivre par le prof. Catsoyannis, qui me laisse l’honneur de quelques interventions ponctuelles. On n’a rien préparé à l’avance, on parle a braccio et pourtant on arrive à ne pas se contredire, voir à être pleinement d’accord, la claaaasse 😀 !!! . Malgré la relative longueur de cette introduction théorique et sa richesse en nuances, on ne perd pas l’attention de notre public, qui au contraire n’hésite pas à nous relancer avec des questions pertinentes : c’est bien parti, place donc à l’action!

Après une grosse demie journée d’artif’ on a le sentiment que tout le monde sait juger correctement si un coinceur est bien posé ou pas : on peut les laisser se défouler en escalade libre en fin d’après midi, ce qui nous place un peu en avance sur le programme.

Le lendemain matin, c’est à mon tour d’animer l’atelier « gants de strap ». Là encore, bonne surprise : les bandages sont confectionnés avec soin, les points clé de mon intervention semblent avoir été retenus. Place à la pratique des techniques de verrou, qui comme d’habitude donne lieu à des résultats assez hétéroclites en fonction de la morphologie de chacun, de la taille des fissures et de la tolérance à la douleur…la personne qui est tout de suite à l’aise dans les chicken-wings ne le sera pas forcement en verrou de poing, celui qui n’a pas mal aux mains peut souffrir des pieds, etc. Comme le souligne justement Lionel, quand on apprend à grimper en fissure il faut accepter d’oublier son aisance en escalade « classique » et repartir de zéro : tout le monde me semble avoir bien saisi le concept et je les vois faire le tour des parcours proposés jusqu’à quand chaque technique est bien intégrée et les réflexes de grimpe en équipé (dulfer, grimpe « extérieure ») s’en vont petit à petit. Chapeau!

On a donc devant nous une journée et demie pour que tout le monde puisse grimper des fissures en tête, avec tout de même une grosse parenthèse théorique sur les relais en trad, argument qui nous est expressement demandé par les stagiaires.  En grimpe, on assiste à un petit « miracle » : quasiment tous les stagiaires se retrouvent très rapidement dans un niveau raisonnablement proche de celui qu’ils ont en falaise équipée, en appliquant (presque) à la lettre nos conseils de méthodes et protections, et étant capables de se briefer mutuellement dans un vrai langage de fissuriste: là tu places le 0.75 et le 1 dans la strate horizontale, ensuite le 3 à l’angle du toit, et tu traverses vers le bac avec des verrous de main au-dessus de la tête. Certes, plein de petits détails restent à affiner, mais l’expérience s’en chargera !

Le jour après le stage, les plus acharnés du groupe restent dans le parages pour grimper en autonomie, en nous empruntant des coinceurs. L’appel des fissures est trop fort, et je me joins à eux pour parcourir l’intégralité de Fanny, la petite grande voie classique du coin, que j’avais jusqu’à la seulement grimpé « en morceaux ». C’est un réel plaisir de partager avec les élèves cette dernière journée de grimpe comme entre copains, en appréciant une fois de plus la capacité d’absorption exceptionnelle de ce public-éponge !

Lionel me confie que bien que ce stage se passe toujours très bien, à chaque fois il est également surpris du résultat, comme si c’était une première. Surpris, je le suis aussi, et je me dis qu’à mes débuts en trad, autodidacte mais avec un niveau en falaise bien plus élevé que ces stagiaires, j’étais bien plus incertain et maladroit qu’eux ! Ce trois jours sont donc une réelle satisfaction professionnelle: j’ai le sentiment d’avoir réussi à transmettre en peu de temps des compétences qui m’ont pris quelques années de pratique pour se construire et se sédimenter, et c’est pour des moments comme celui ci que je fais ce métier.

Un grand merci à Caroline, Erwan, Remi, Tristan, Jean-Philippe, Hubert, Louis, Jeremy, Julia, Lina, Marc et Mathilde!

Gianluca