J’ai profité de ces jours confinement pour enfin lire “Les fous du Verdon”, livre qui trainait neuf sur une étagère de ma demeure, depuis des années. Je vous en détaille ici quelques rapides impression: bien qu’il ne soit pas une nouveauté, le livre mérite sa place dans la bibliothèque de tout amoureux de ces parois calcaires, et il est donc intéressant de le signaler en 2020… 

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Confinement: faute d’aller au Verdon physiquement, on s’y rend grâce à l’œuvre littéraire…

Une chronique de l’histoire des lieux 

Ce livre retrace avec une richesse de détails impressionnante l’histoire de l’escalade dans les gorges depuis Les enragés, première voie dans les gorges datant de 1968, jusqu’au début des années 2000 (la première impression date de 2008). On en tire une chronologie très précise des ouvertures marquantes des lieux, de l’arrivée de “vaguessuccessives d’équipes de pionniers, et des évolutions des styles d’ouverture et d’équipement. L’histoire de ces escalades étant une histoire de grimpeurs, les mœurs, les liens d’amitié et rivalité, les quelques polémiques marquantes sont aussi esquissés, avec une place particulière pour ces années ‘70 que l’auteur a vécu en première personne et qu’il rappelle avec nostalgie. 

Un souci d’exhaustivité et sobriété

Le parti pris du bouquin est de toute évidence d’être exhaustif et précis, sans oublier aucun protagoniste et relatant la genèse de toutes les lignes importantes. Cet approche en fait à la fois la force et la faiblesse.

En positif, on pourra dire qu’il y a de quoi donner aux nouvelles générations une idée précise de l’histoire des lieux, et en ce sens le livre serait, à mon avis, le complément idéal de la consultation du topo. Il faudrait presque avoir un index par voie en fin de texte!

D’autre part, à mon humble avis ce choix, couplé avec une chronologie assez stricte, rend la lecture parfois un peu répétitive. Par rapport à « Camp 4« , la référence de ce genre de récit historique d’escalade, les personnages sont un peu en retrait par rapport à leurs actes. Si ce qu’on retient de la lecture de l’œuvre de Steve Roper est la façon dont la personnalité des protagonistes a influencé l’histoire des escalades, la rivalité Harding/Robbins en étant l’exemple fulgurant, dans « les fous du Verdon » cette dynamique est moins mise en avant. Il serait intéressant d’en discuter avec Bernard Vaucher en personne, mais mon soupçon est qu’il ait eu une sorte de pudeur à cet égard: le livre reste assez sobre en matière d’anecdotes et profils psychologiques, peut-être par proximité avec beaucoup des personnages cités, peur de ne pas en dresser des portrait justes, de devoir consacrer beaucoup d’espace à quelques chefs de file choisis arbitrairement, et donc délaisser injustement les autres personnages. Soyons clairs: l’humain n’est pas ce qui manque, mais tout ce qui ne relève pas du factuel et de l’escalade est esquissé sans sensationnalismes et parfois avec euphémisation par rapport à la façon dont certaines « légendes » sont relatées à l’oral.  En quelque sorte, Vaucher a voulu être Thucydide, plutôt qu’Homère.

En conclusion: cette lecture serait un texte essentiel si les diplômes de moniteur d’escalade faisaient de l’histoire de la discipline un pilier de leur formation, et il faudrait presque obliger tous les grimpeurs approchant les gorges à y plonger le nez, ne serait ce qu’une demie heure ici et là pendant leur séjour sur les lieux. En revanche, le livre laissera sur leur faim ceux qui s’attendent à une épopée haute en couleur, à un récit épique en sauce sudiste dont les témoignages fondateurs auraient étés récoltés chez Lou Cafetié, avec la complicité de quelques verres…

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